Explication de l'Enluminure
2 participants
Citadelle du Rey: Ordre Équestre et Royal du Saint Sépulcre :: Les alentours de la Citadelle :: Lycée de l'Ordre :: La Bibliothèque "Cicéron" :: Ouvrages de littérature, philosophie et œuvres artistiques
Page 1 sur 1
Explication de l'Enluminure
Explication de l'Enluminure
Source: Wikipedia
Le terme "Enluminure" est souvent associé à celui de "miniature", qui vient du latin minium, désignant un rouge vermillon. Jadis, le terme s'appliquait, de préférence, aux lettres ornementales majuscules (lettrines) dessinées en rouge sur les manuscrits ; puis le rapprochement (sans fondement étymologique) avec les mots minimum, minuscule, s'est opéré, et la miniature a désigné les images peintes, de petite taille, comparées aux tableaux et aux peintures murales (fresques). S'appliquant à toute représentation de format réduit, le terme a donc désigné également les petites scènes peintes sur d'autres objets que les manuscrits.
On peut donc parler de manuscrits enluminés, de manuscrits à miniatures, et même de manuscrits à peintures, comme le font certains spécialistes, puisque l'artiste chargé de cette part de l'œuvre était nommé pictor au Moyen Âge, pour le distinguer du scriptor (étymologiquement ce terme a donné scribe c'est-à-dire "celui qui écrit", mais copiste est plus adapté pour le Moyen Âge) chargé de la seule copie du texte.
Les types d'enluminure
L'enluminure n'est pas, comme le veut une idée reçue, que la simple lettre mise en couleur par les copistes en début de chapitre ou de paragraphe, permettant ainsi de saisir facilement la structure du texte.
Sur le plan matériel, un ouvrage écrit comporte un texte dont les caractères ont une forme: lorsque l'écriture a une fin esthétique, on parle de calligraphie. L'étude des écritures anciennes est l'objet de la paléographie.
L'enluminure tantôt se mêle au texte et tantôt s'en éloigne, au point même, parfois, de ne plus entretenir aucune relation avec lui. On peut établir les distinctions suivantes, tout en notant leur caractère arbitraire, les artistes mêlant volontiers les genres.
Bible de Jan de Selmberk, 1440. Exposée à la bibliothèque du couvent de Strahov, PragueScènes figurées (historiées)
Pleines pages (ex. les Beatus)
Insérées entre deux paragraphes ou chapitres
En marge
Compositions décoratives
"Les motifs réalisés peuvent être abstraits, composés d'entrelacs, de bordures, de bandeaux aux formes géométriques répétitives. On peut aussi trouver un ensemble végétal et animal à vocation ornementale: les figures sont alors stylisées. La surface occupée par ces compositions varie énormément: de la simple bordure encadrant le texte, aux "pages tapis" entièrement recouvertes."
Bordures (ex. les manuscrits flamands du XVe siècle)
Bandeaux marginaux
Cartouches
Ce sont des ornements en forme de parchemin dont les extrémités sont enroulées (généralement en sens inverse) destinés à recevoir, dans la partie centrale une inscription.
Frontispices
Composition placée en première page.
Fins de lignes
Motif plus ou moins allongé, ayant la hauteur du corps des lettres, et destiné à combler le vide entre le dernier mot écrit et la marge de droite.
Signes de paragraphes ou pied de mouche
Lorsque le texte est copié en continu, un motif peint, assez simple et stéréotypé, marquait la séparation entre deux paragraphes ou entre deux versets du texte original.
Grotesques ou drôleries
Dans les marges, en-têtes et pieds de pages des manuscrits gothiques tardifs, on voit, parmi les entrelacs végétaux des créatures oniriques plus ou moins monstrueuses et comiques. Le terme grotesque vient de l'italien pittura grottesca, qui désignait des images peintes découvertes à partir du XVe siècle à Tivoli dans la Villa Hadriana, le mot grottes désignant jadis les monuments enfouis.
Lettres simples
Leur étude se partage entre l'esthétique et la paléographie.
Lettres champies
Ce sont des lettres, la plupart du temps dorées, placées sur un fond peint, rehaussées de motifs stéréotypés.
Lettres filigranées
Ce sont des lettres décorées d'un motif d'inspiration végétal dessiné à la plume fine
Lettres ornées
Elles sont constituées par le dessin de la majuscule auquel s'ajoutent des entrelacs, des plantes, des animaux et même des personnages, sans qu'il s'agisse d'une scène proprement dite.
Lettrines synthétiques
Le décor seul dessine la lettre (moines en train de couper du bois, par exemple).
Lettres historiées
Des scènes narratives sont représentées dans les espaces libres de la lettre.
Signes divers
Il ne s'agit pas d'enluminures proprement dites, mais certains de ces signes ont une valeur esthétique qui leur ouvre une place dans cette nomenclature.
* Signes d'oublis et de fautes dans les marges
* Signes d'annotations: Dans les marges, la manicule destinée à appeler l'attention du lecteur sur un passage particulier du texte
* On trouve également des esquisses de la future enluminure, réalisées à l'encre pâle ou, à partir du XIIIe siècle, à la mine de plomb, et destinées au peintre.
Dernière édition par Angeline_des_Yris le Mar 28 Juin 2011, 12:18, édité 2 fois
Angeline_des_Yris- Ancien Membre de l'Ordre
- Nombre de messages : 943
Localisation : Limousin
Date d'inscription : 18/03/2011
Re: Explication de l'Enluminure
Pontifical (Liber Pontificalis) d'Albert de Sternberg, 1376. Exposé au monastère de Strahov (Initiales ou lettrines)
La technique
Les moines enlumineurs enluminaient les livres rédigés par des moines copistes. La technique de l'enluminure comporte trois activités: l'esquisse, le mélange des pigments de couleurs avec la colle animal et le coloriage par couche.
Le volumen et le codex
Les premiers manuscrits enluminés sont les ouvrages de l'Égypte pharaonique, constitués de papyrus et en forme de rouleaux plus ou moins longs.
Le Livre des morts d' Ani (British Museum) mesure 24 mètres, et le manuscrit de Turin environ 58 mètres.
Ici, il ne sera question que de l'enluminure occidentale, telle qu'on la trouve principalement sur le parchemin.
On appelle volumen le livre formé d'une feuille unique faite de plusieurs feuillets cousus à la suite les uns des autres, et enroulée sur elle-même ou sur un bâtonnet de bois. Le mot vient du latin volvere, rouler, enrouler.
Le codex [1] est un livre à pages cousues, qui apparaît au IIe siècle [2]. Il représente un progrès remarquable par rapport au volumen.
Le codex contient deux fois plus de texte puisqu'on peut écrire sur le recto et le verso.
Il est plus facilement transportable, maniable et entreposable.
Sur le plan intellectuel, le codex présente d'énormes avantages dans la mesure où il facilite la « navigation » du lecteur dans le texte: le volumen rend difficile le retour en arrière, la recherche d'un passage, ce qui permet à la lecture sélective de se répandre. Le texte devient donc plus précis, les citations plus exactes.
On voit apparaître de nouvelles techniques de mise en relation, comme les tables de concordances, les gloses et les notes.
Le codex permet le regroupement de textes dans une même reliure.
L'enluminure se développe mieux dans le codex en parchemin que sur le volumen en papyrus.
Néanmoins, le codex ne fait pas disparaître le volumen enluminé. Ainsi, dans l'abbaye de Saint-Bavon à Gand, un volumen datant de 1406 et comportant une belle enluminure historiée est conservé. Mais généralement les rouleaux tardifs ne sont pas enluminés: ils sont utilisés pour des généalogies, des chroniques, des inventaires, des pièces de procédure, etc.[3]
Le parchemin, support par excellence de l'enluminure[modifier]Le papyrus est très fragile et boit facilement l'encre et les couleurs. Le parchemin est beaucoup plus résistant et offre plus de possibilités à la création artistique du fait qu'il supporte mieux l'action chimique des encres et des couleurs.
Le parchemin le plus apte à recevoir un texte calligraphié et enluminé, est préparé à partir de peaux d'animaux maigres, comme le mouton et la chèvre. Dans les périodes de grande production, liée à l'essor des universités dans les villes, les différentes étapes de la fabrication seront confiées à des corps de métiers spécifiques: mégisserie, chamoiserie, et parcheminerie.
Le plus beau parchemin est le vélin, qui désigne les peaux des animaux mort-nés (veau, agneau, chevreau). Les manuscrits sur vélin étaient les plus rares et les plus chers. De nos jours encore, le vélin de veau est le seul support utilisé par les Juifs pour copier la Torah. Le mot désigne aussi un papier à lettre de haute qualité (par exemple le vélin d'Angoulême).
Dans le codex, les lignes étaient ensuite tracées au stylet à espaces réguliers, sur toute la page. La trace en reste visible. Le texte était ensuite copié en réservant des espaces pour les titres, les initiales et les images. On trouve encore dans les marges de légères ébauches de lettrines ou d'images destinées aux artistes.
Encres
Encre rouge: à base de minium (oxyde de plomb, Pb3 O4).
Sépia (brun très foncé), du mot latin qui désigne la seiche dont le liquide fournit cette encre. Ci-dessous, quelques encres:
Noir: dissolution du noir de fumée dans de l'eau ou de la noix de galle du chêne (Cynips kollari)mêlée au vitriol et à la gomme arabique .
Bleu: oxyde de cobalt, poudre de lapis-lazuli (extrêmement coûteuse), azurite (minéral) (carbonate de cuivre).
Rouge vif et orangé: sulfure de mercure (on utilise le terme cinabre lorsque son origine est minérale, et vermillon lorsqu'il est artificiel).
Rouge orangé mat: orpiment[6] et réalgar[7], qui sont des sulfures d'arsenic (As2 S2).
Vert: à base d'argile ou de composés de cuivre.
Jaune: à base d'or pur.
Fabrication de l'encre
Il est facile de fabriquer soi-même son encre.
Pour ce faire, il vous faudra très peu d'ingrédients, pour la plupart disponibles dans n'importe quelle quincaillerie.
Pour un demi litre d'eau, il faut environ :
- 10 g de noix de galle
- 7 g de sulfate de cuivre en poudre
- 10 g de gomme arabique
Noix de galle
sulfate de cuivre(vous le trouverez en poudre)
Gomme arabique
Les noix de galle sont des parasites du chêne : lorsque le cynips (une sorte de petite mouche) pond son oeuf sous l'écorce de l'arbre, une noix se forme. Ces noix sont gorgées de tannins, elles sont donc indispensables à la fabrication de l'encre.
La gomme arabique, quant à elle, est en fait de la sève d'acacia. Cet arbre est un symbole d'immortalité et de victoire sur la mort : quoi de plus approprié pour fixer l'encre de manuscrits vieux de plusieurs siècles.
1) Broyez les noix, puis faites-les macérer dans l'eau pendant une à deux semaines afin d'extraire les tannins
2) Filtrez, puis faites réduire le filtrat jusqu'à ce qu'il ne reste qu'un quart de la quantité initiale. Cette opération est importante : une encre mal réalisée est aqueuse, et "ruisselle" littéralement sur le papier (veillez à utiliser une casserole qui ne risque plus rien)
3) Ajoutez le sulfate et la gomme et remuez jusqu'à dissolution
Vous pouvez varier le dosage de la gomme arabique : un excès de gomme donnera de la brillance à votre encre.
Attention, cette encre ne doit pas être utilisée avec des plumes métalliques, qui risqueraient de s'oxyder au contact du sulfate de cuivre !
Cette encre poserait malgré tout, actuellement des problèmes pour la conservation des manuscrits médiévaux
Couleurs:
Les couleurs sont obtenues à partir de produits végétaux, animaux et minéraux : fleur de safran, racine de garance et de curcuma, cochenilles, coquillages, foies d’animaux, urine, lapis-lazuli et parfois, les peintres peuvent utiliser de la graisse animale. Cela permettait d’obtenir un mélange flasque et visqueux.
C’était la meilleure façon pour eux d’obtenir un mélange qui résistait au grand froid. La graisse animale était surtout de la graisse de mouton ou d’agneau car c’était celle qui était la plus dense. Les étapes :
1.On remuait la graisse de manière à ce qu'elle soit totalement homogène:
2.On ajoutait quelques produits chimiques qui permettaient de lui donner la couleur désirée:
3.La graisse était ensuite un peu conservée dans un endroit frais (une cave par exemple):
4.Ensuite elle était à nouveau malaxée puis étalée sur un grand plateau afin qu'elle forme une plaque fine:
5.On l'ajoutait ensuite dans la pâte qui sera plus tard le parchemin.
Liants[modifier]On utilisait des liants et des colles pour permettre à la couleur d'adhérer sur le parchemin: colles de poissons, blanc d'œuf (auquel on ajoute de la poudre de clou de girofle pour assurer la conservation), résines, gommes (surtout la gomme arabique), etc.
Les couleurs se mélangent très mal, et souvent ne se mélangent pas du tout. L'artiste travaille « ton sur ton » après séchage, et joue avec les liants pour obtenir les nuances à partir d'un même pigment.
Jusqu'au XIVe siècle, avec l'apparition de la gouache, la peinture est obligatoirement cernée d'un trait d'encre dessiné à la plume.[/font]
Angeline_des_Yris- Ancien Membre de l'Ordre
- Nombre de messages : 943
Localisation : Limousin
Date d'inscription : 18/03/2011
Re: Explication de l'Enluminure
Les manuscrits enluminés
L'enluminure est une pratique typiquement médiévale, répandue dans tous les pays d'Europe occidentale, consistant à décorer manuellement, par la peinture ou le dessin, un livre manuscrit. Débutant dans l'Antiquité tardive (IIIe-Ve siècle) avec des techniques rudimentaires, elle s'est achevée quelques temps après l'invention de l'imprimerie.
Le mot enluminure vient du latin lumen, lumière. Enluminer, c'est mettre de la lumière, c'est-à-dire de l'or – celui qui entoure la tête des saints ou du Christ et produit cette lumière divine. En effet, la majorité des enluminures ornent ou illustrent des textes religieux.
Les manuscrits
Manuscrits religieux
La Bible a été, tout au long du Moyen Âge, le livre le plus diffusé et le plus enluminé. En effet, après l'effondrement des institutions romaines (IVe siècle), l'éducation fut à la charge des monastères. Les moines eurent donc un grand besoin de livres pour instruire les laïcs, et c'est tout naturellement à partir de la Bible qu'ils dispensèrent cette instruction.
Progressivement, avec l'apparition de nouveaux autres ordres religieux, les manuscrits se diversifièrent. On réalisa des psautiers (livres de psaumes), des évangéliaires (livres contenant des passages de l'Évangile), des bréviaires (livres contenant les prières quotidiennes des moines et des prêtres), des antiphonaires (recueil de chants religieux), des lectionnaires (recueil des lectures de l'office), etc.
À la fin du Moyen Âge apparurent les livres d'Heures, recueil de prières récitées durant l'office.
Manuscrits laïcs
À partir du XIIIe siècle, les universités nouvellement créées remplacèrent les monastères dans la diffusion de l'instruction. On eut donc besoin de livres pour apprendre autre chose que la religion. C'est la grande époque des manuels, ouvrages universitaires ou traités pratiques : traités de médecine, d'astronomie, d'astrologie, de musique, de chasse, d'art militaire. Les dictionnaires et les sommes, encyclopédies à thème, se développent. Les textes des auteurs grecs et latins de l'Antiquité connaissent un grand succès, de même que les récits historiques et les chroniques.
Les ouvrages rédigés non plus en latin mais en langue "vulgaire" – ce que nous appelons aujourd'hui du "vieux français" – se multiplient, notamment dans les livres destinés à se distraire : chansons de geste, romans de chevalerie et poèmes épiques.
Les différents types d'enluminures
Le Moyen Âge s'étendant du Ve au XVe siècle, les enluminures sont différentes selon l'époque et le lieu de fabrication.
Le Haut Moyen Âge (Ve-IXe siècles)
Deux types d'enluminures coexistent durant cette période : l'enluminure insulaire et l'enluminure mérovingienne.
Après que l'Irlande eut été évangélisée par le missionnaire saint Patrick, au Ve siècle, les moines irlandais s'adonnèrent à la copie et à l'enluminure des manuscrits dans les monastères des îles d'Iowa, de Lindisfarne et de Durrow. C'est là que furent réalisés les manuscrits richement enluminés connus sous les noms de Livre de Kells, Évangéliaire de Lindisfarne, Livre de Durrow. Leur facture est caractéristique : les dessins géométriques, les spirales et les entrelacs sont utilisés pour les bordures et les lettres ornées, souvent de très grande taille. L'écriture utilisée pour le texte est dite semi-onciale.
Sur le continent se développe une autre forme d'enluminure. L'enluminure mérovingienne se caractérise par des lettrines en forme d'animaux, très souvent poissons et oiseaux, aux couleurs très vives. C'est dans les monastères de Luxeuil, en France, de Bobbio et de Corbie, en Italie, que sont réalisées les plus belles enluminures, notamment celles du Lectionnaire de Luxeuil et du Psautier de Corbie.
L'enluminure carolingienne (IXe-Xe siècles)
Sous le règne de Charlemagne, on continue à décorer les manuscrits avec des feuillages ou des animaux entrelacés. La "lettre historiée", initiale à l'intérieur de laquelle des personnages racontent une histoire, se développe.
Des "écoles" au style d'enluminure distinctif apparaissent, signe du renforcement du rôle de l'enluminure dans la production des manuscrits. L'école du Palais nous a légué le Psautier d'Utrecht, celle de Metz le Sacramentaire de Drogon, celle de Tours la Bible de Charles le Chauve .
Les changements introduits par l'époque se situent plutôt au niveau de l'écriture – on utilise désormais la caroline – et de la production abondante de textes des auteurs antiques et des Pères de l'Église, les premiers auteurs de la chrétienté. Le manuscrit enluminé des Moralia in Job de Grégoire le Grand, réalisé à l'abbaye de Cîteaux, et celui des Confessions de saint Augustin, datent de cette époque.
L'enluminure romane (XIe-XIIe siècles)
La tradition antique se poursuit tandis que les différents éléments apparus précédemment – lettres ornées, lettres historiées, feuillages, animaux – s'ajoutent les uns aux autres.
Les rinceaux, tiges stylisées disposées en enroulement, sont utilisés à profusion dans les bordures. Les "pages-tapis" ou peintures "à pleine page" occupent tout l'espace de la page.
L'école de Cantorbéry (Psautier de Bury Saint Edmunds) et l'école de Winchester (Bible de Winchester) se distinguent, l'une par le dessin polychrome et l'autre par des gouaches épaisses annonçant celles qui seront utilisées à l'époque gothique.
L'enluminure gothique (XIIIe-XVe siècles)
C'est la grande époque de l'enluminure : les manuscrits enluminés deviennent de véritables objets de luxe, comme les Très Riches Heures du Duc de Berry, du fait de la richesse, de la diversité et de l'abondance de leurs illustrations. Tous les types d'ouvrages sont concernés y compris les bibles : les "Bibles moralisées" sont tellement illustrées qu'elles ressemblent à des bandes dessinées.
L'art du vitrail inspire aux enlumineurs la composition en médaillon. Les "marges à drôleries" apparaissent : des animaux étranges et des personnages aux postures étonnantes sont dessinés dans les marges. Leur présence n'a en général aucun rapport avec le texte.
Les grisailles se conjuguent aux essais de perspective comme dans le Livre d'Heures de Jeanne d'Évreux. Les fonds ne sont plus uniformes mais décorés de motifs ; les plus fréquents sont les fonds en damier.
À la fin du Moyen Âge, les premiers livres imprimés sont encore décorés à la main. Puis, face à la nécessité d'augmenter la production, l'illustration des livres devient gravure tandis que l'enluminure, détachée du support du texte, perd sa raison d'être. Elle se transforme en un art autonome : la peinture de chevalet.
La production
Le mode de production des manuscrits enluminés est resté pratiquement constant jusqu'au XIIIe siècle.
Les scriptoria
Inséparable de la copie des manuscrits, l'enluminure était, à l'origine, réalisée par des moines dans le scriptorium des monastères ou des abbayes. Les copistes copiaient le texte, en se relayant pour un même ouvrage afin de ne pas conserver trop longtemps le texte original qu'ils avaient emprunté. Puis les rubricateurs chargés des travaux à l'encre rouge, intervenaient dans les espaces laissés libres par les copistes. Ils rédigeaient les titres des chapitres, les sous-titres, les majuscules et les initiales simples.
Enfin les enlumineurs réalisaient les décors avec l'or et les pigments de couleur.
Jusqu'à l'époque gothique, le copiste, le rubricateur et l'enlumineur pouvait être une seule et même personne, le plus souvent un moine.
Les ateliers laïques
Ce n'est qu'avec l'essor des Universités, au XIIIe siècle, que les différentes tâches furent dissociées et confiées à des laïcs, professionnels spécialisés. Des ateliers, installés parfois dans l'enceinte même de l'Université, ont donc progressivement remplacés les scriptoria monastiques.
Leur organisation rigoureuse a permit de répondre à la demande croissante de livres et d'assurer un contrôle sur la qualité des textes. Ceux-ci étaient en effet truffés d'erreurs, car les moines avaient pris l'habitude d'abréger les mots pour gagner de la place et de noter leurs commentaires en marge du texte (glose). Grâce au "libraire" agréé par l'Université, un exemplaire parfaitement exact (exempla) était divisé en plusieurs morceaux (pecia) dont chacun était copié par un professionnel. Ainsi, plusieurs copistes travaillaient simultanément sur un même texte, ce qui réduisait considérablement la durée d'exécution d'un manuscrit.
Les ateliers étaient eux-mêmes spécialisés : les uns dans la copie des textes, les autres dans la réalisation des lettrines, d'autres encore dans l'enluminure. Parmi ceux-ci, certains étaient dirigés par des maîtres restés célèbres – comme les frères Limbourg, André Beauneveu, le maître de Boucicault ou encore Jean Pucelle –, qui travaillaient pour le roi ou les seigneurs.
La diffusion
Dès le règne de Charlemagne, une grande partie des manuscrits enluminés fut réalisée à la demande de la cour, des seigneurs ou des bourgeois lettrés. Pour cette raison, les manuscrits, qui portaient auparavant le nom du lieu où ils étaient fabriqués, portèrent désormais le nom de leur commanditaire. Celui-ci était d'ailleurs fréquemment représenté sur les enluminures, le plus souvent dans une attitude de prière (comme le duc de Berry dans les Très Belles Heures), ou revêtu d'un vêtement portant ses armoiries (comme Gaston Phébus dans Le Livre de chasse).
Posséder un manuscrit enluminé était un signe de richesse. Le livre était en effet un objet rare et au coût très élevé du fait de l'abondance des enluminures et, parfois, de la magnificence des reliures en ivoire, en or ou en velours agrémenté de broderies. Ceux qui les possédaient, conscients de leur valeur, les rangeaient dans un coffre avec les bourses et les tissus précieux. Les plus riches – rois, princes et seigneurs – les collectionnaient et les transmettaient à leurs descendants. Les communautés religieuses les rangeaient soigneusement dans la bibliothèque.
Grâce à cela, un grand nombre de manuscrits enluminés ont été conservés.
L'enluminure est une pratique typiquement médiévale, répandue dans tous les pays d'Europe occidentale, consistant à décorer manuellement, par la peinture ou le dessin, un livre manuscrit. Débutant dans l'Antiquité tardive (IIIe-Ve siècle) avec des techniques rudimentaires, elle s'est achevée quelques temps après l'invention de l'imprimerie.
Le mot enluminure vient du latin lumen, lumière. Enluminer, c'est mettre de la lumière, c'est-à-dire de l'or – celui qui entoure la tête des saints ou du Christ et produit cette lumière divine. En effet, la majorité des enluminures ornent ou illustrent des textes religieux.
Les manuscrits
Manuscrits religieux
La Bible a été, tout au long du Moyen Âge, le livre le plus diffusé et le plus enluminé. En effet, après l'effondrement des institutions romaines (IVe siècle), l'éducation fut à la charge des monastères. Les moines eurent donc un grand besoin de livres pour instruire les laïcs, et c'est tout naturellement à partir de la Bible qu'ils dispensèrent cette instruction.
Progressivement, avec l'apparition de nouveaux autres ordres religieux, les manuscrits se diversifièrent. On réalisa des psautiers (livres de psaumes), des évangéliaires (livres contenant des passages de l'Évangile), des bréviaires (livres contenant les prières quotidiennes des moines et des prêtres), des antiphonaires (recueil de chants religieux), des lectionnaires (recueil des lectures de l'office), etc.
À la fin du Moyen Âge apparurent les livres d'Heures, recueil de prières récitées durant l'office.
Manuscrits laïcs
À partir du XIIIe siècle, les universités nouvellement créées remplacèrent les monastères dans la diffusion de l'instruction. On eut donc besoin de livres pour apprendre autre chose que la religion. C'est la grande époque des manuels, ouvrages universitaires ou traités pratiques : traités de médecine, d'astronomie, d'astrologie, de musique, de chasse, d'art militaire. Les dictionnaires et les sommes, encyclopédies à thème, se développent. Les textes des auteurs grecs et latins de l'Antiquité connaissent un grand succès, de même que les récits historiques et les chroniques.
Les ouvrages rédigés non plus en latin mais en langue "vulgaire" – ce que nous appelons aujourd'hui du "vieux français" – se multiplient, notamment dans les livres destinés à se distraire : chansons de geste, romans de chevalerie et poèmes épiques.
Les différents types d'enluminures
Le Moyen Âge s'étendant du Ve au XVe siècle, les enluminures sont différentes selon l'époque et le lieu de fabrication.
Le Haut Moyen Âge (Ve-IXe siècles)
Deux types d'enluminures coexistent durant cette période : l'enluminure insulaire et l'enluminure mérovingienne.
Après que l'Irlande eut été évangélisée par le missionnaire saint Patrick, au Ve siècle, les moines irlandais s'adonnèrent à la copie et à l'enluminure des manuscrits dans les monastères des îles d'Iowa, de Lindisfarne et de Durrow. C'est là que furent réalisés les manuscrits richement enluminés connus sous les noms de Livre de Kells, Évangéliaire de Lindisfarne, Livre de Durrow. Leur facture est caractéristique : les dessins géométriques, les spirales et les entrelacs sont utilisés pour les bordures et les lettres ornées, souvent de très grande taille. L'écriture utilisée pour le texte est dite semi-onciale.
Sur le continent se développe une autre forme d'enluminure. L'enluminure mérovingienne se caractérise par des lettrines en forme d'animaux, très souvent poissons et oiseaux, aux couleurs très vives. C'est dans les monastères de Luxeuil, en France, de Bobbio et de Corbie, en Italie, que sont réalisées les plus belles enluminures, notamment celles du Lectionnaire de Luxeuil et du Psautier de Corbie.
L'enluminure carolingienne (IXe-Xe siècles)
Sous le règne de Charlemagne, on continue à décorer les manuscrits avec des feuillages ou des animaux entrelacés. La "lettre historiée", initiale à l'intérieur de laquelle des personnages racontent une histoire, se développe.
Des "écoles" au style d'enluminure distinctif apparaissent, signe du renforcement du rôle de l'enluminure dans la production des manuscrits. L'école du Palais nous a légué le Psautier d'Utrecht, celle de Metz le Sacramentaire de Drogon, celle de Tours la Bible de Charles le Chauve .
Les changements introduits par l'époque se situent plutôt au niveau de l'écriture – on utilise désormais la caroline – et de la production abondante de textes des auteurs antiques et des Pères de l'Église, les premiers auteurs de la chrétienté. Le manuscrit enluminé des Moralia in Job de Grégoire le Grand, réalisé à l'abbaye de Cîteaux, et celui des Confessions de saint Augustin, datent de cette époque.
L'enluminure romane (XIe-XIIe siècles)
La tradition antique se poursuit tandis que les différents éléments apparus précédemment – lettres ornées, lettres historiées, feuillages, animaux – s'ajoutent les uns aux autres.
Les rinceaux, tiges stylisées disposées en enroulement, sont utilisés à profusion dans les bordures. Les "pages-tapis" ou peintures "à pleine page" occupent tout l'espace de la page.
L'école de Cantorbéry (Psautier de Bury Saint Edmunds) et l'école de Winchester (Bible de Winchester) se distinguent, l'une par le dessin polychrome et l'autre par des gouaches épaisses annonçant celles qui seront utilisées à l'époque gothique.
L'enluminure gothique (XIIIe-XVe siècles)
C'est la grande époque de l'enluminure : les manuscrits enluminés deviennent de véritables objets de luxe, comme les Très Riches Heures du Duc de Berry, du fait de la richesse, de la diversité et de l'abondance de leurs illustrations. Tous les types d'ouvrages sont concernés y compris les bibles : les "Bibles moralisées" sont tellement illustrées qu'elles ressemblent à des bandes dessinées.
L'art du vitrail inspire aux enlumineurs la composition en médaillon. Les "marges à drôleries" apparaissent : des animaux étranges et des personnages aux postures étonnantes sont dessinés dans les marges. Leur présence n'a en général aucun rapport avec le texte.
Les grisailles se conjuguent aux essais de perspective comme dans le Livre d'Heures de Jeanne d'Évreux. Les fonds ne sont plus uniformes mais décorés de motifs ; les plus fréquents sont les fonds en damier.
À la fin du Moyen Âge, les premiers livres imprimés sont encore décorés à la main. Puis, face à la nécessité d'augmenter la production, l'illustration des livres devient gravure tandis que l'enluminure, détachée du support du texte, perd sa raison d'être. Elle se transforme en un art autonome : la peinture de chevalet.
La production
Le mode de production des manuscrits enluminés est resté pratiquement constant jusqu'au XIIIe siècle.
Les scriptoria
Inséparable de la copie des manuscrits, l'enluminure était, à l'origine, réalisée par des moines dans le scriptorium des monastères ou des abbayes. Les copistes copiaient le texte, en se relayant pour un même ouvrage afin de ne pas conserver trop longtemps le texte original qu'ils avaient emprunté. Puis les rubricateurs chargés des travaux à l'encre rouge, intervenaient dans les espaces laissés libres par les copistes. Ils rédigeaient les titres des chapitres, les sous-titres, les majuscules et les initiales simples.
Enfin les enlumineurs réalisaient les décors avec l'or et les pigments de couleur.
Jusqu'à l'époque gothique, le copiste, le rubricateur et l'enlumineur pouvait être une seule et même personne, le plus souvent un moine.
Les ateliers laïques
Ce n'est qu'avec l'essor des Universités, au XIIIe siècle, que les différentes tâches furent dissociées et confiées à des laïcs, professionnels spécialisés. Des ateliers, installés parfois dans l'enceinte même de l'Université, ont donc progressivement remplacés les scriptoria monastiques.
Leur organisation rigoureuse a permit de répondre à la demande croissante de livres et d'assurer un contrôle sur la qualité des textes. Ceux-ci étaient en effet truffés d'erreurs, car les moines avaient pris l'habitude d'abréger les mots pour gagner de la place et de noter leurs commentaires en marge du texte (glose). Grâce au "libraire" agréé par l'Université, un exemplaire parfaitement exact (exempla) était divisé en plusieurs morceaux (pecia) dont chacun était copié par un professionnel. Ainsi, plusieurs copistes travaillaient simultanément sur un même texte, ce qui réduisait considérablement la durée d'exécution d'un manuscrit.
Les ateliers étaient eux-mêmes spécialisés : les uns dans la copie des textes, les autres dans la réalisation des lettrines, d'autres encore dans l'enluminure. Parmi ceux-ci, certains étaient dirigés par des maîtres restés célèbres – comme les frères Limbourg, André Beauneveu, le maître de Boucicault ou encore Jean Pucelle –, qui travaillaient pour le roi ou les seigneurs.
La diffusion
Dès le règne de Charlemagne, une grande partie des manuscrits enluminés fut réalisée à la demande de la cour, des seigneurs ou des bourgeois lettrés. Pour cette raison, les manuscrits, qui portaient auparavant le nom du lieu où ils étaient fabriqués, portèrent désormais le nom de leur commanditaire. Celui-ci était d'ailleurs fréquemment représenté sur les enluminures, le plus souvent dans une attitude de prière (comme le duc de Berry dans les Très Belles Heures), ou revêtu d'un vêtement portant ses armoiries (comme Gaston Phébus dans Le Livre de chasse).
Posséder un manuscrit enluminé était un signe de richesse. Le livre était en effet un objet rare et au coût très élevé du fait de l'abondance des enluminures et, parfois, de la magnificence des reliures en ivoire, en or ou en velours agrémenté de broderies. Ceux qui les possédaient, conscients de leur valeur, les rangeaient dans un coffre avec les bourses et les tissus précieux. Les plus riches – rois, princes et seigneurs – les collectionnaient et les transmettaient à leurs descendants. Les communautés religieuses les rangeaient soigneusement dans la bibliothèque.
Grâce à cela, un grand nombre de manuscrits enluminés ont été conservés.
Kerraaoc- Ancien Membre de l'Ordre
- Nombre de messages : 2209
Age : 42
Localisation : Orléans
Date d'inscription : 28/09/2008
Citadelle du Rey: Ordre Équestre et Royal du Saint Sépulcre :: Les alentours de la Citadelle :: Lycée de l'Ordre :: La Bibliothèque "Cicéron" :: Ouvrages de littérature, philosophie et œuvres artistiques
Page 1 sur 1
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum