Le peuple et le Roy
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Le peuple et le Roy
Comment doit être le peuple dans sa façon de connaître, honorer et garder son Roy.
Aristote et les autres sages ont conçu une similitude entre la deuxième âme, qu'ils ont appelée sensitive, et le Roy, montrant par là comment le peuple doit se comporter à son endRoyt. Ils ont dit que de même qu’en cette âme il y a dix sens, de même le peuple doit observer dix choses dans sa façon d'être et d'agir envers son Roy, afin de pleinement l'honorer, l'aimer et le garder. Aussi, puisque nous avons parlé dans le titre précédent de la manière dont le peuple doit connaître, aimer et craindre Dieu, nous voulons dire ici comment le peuple doit être envers son Roy, quant aux choses susdites, selon ce que les sages ont exposé, par similitude.
Loi I : Comment le peuple doit toujours désirer voir le bien pour son Roy et non le mal.
La vue est le premier des cinq sens externes à propos desquels Aristote et les autres sages ont conçu une similitude avec le peuple. En effet, de même que lorsque la vue est saine et claire, elle perçoit de loin les choses et en distingue les contours et les couleurs, de même le peuple doit voir et savoir que le nom du Roy vient de Dieu, que le Roy occupe ses lieu et place sur terre pour faire justice, dRoyt et grâce ; qu'il est, en outre, leur seigneur temporel, et eux ses vassaux, et qu'il doit les éduquer et les commander, tandis qu'eux doivent le servir et lui obéir. C’est pourquoi le peuple doit voir de loin les choses qui contribuent au bien, à l'honneur et à la sauvegarde du Roy, et faire diligence pour s'en saisir et les accroître ; quant à celles qui lui seraient nuisibles, il doit les repousser et les écarter autant qu'il le pourra. Et la chose qu’il doit désirer par-dessus tout et vouloir c’est la vie de son Roy, car elle contient toutes les autres. Voilà pourquoi le peuple loyal ne doit pas désirer sa mort, ni souhaiter la voir en aucune façon, car ceux qui le feraient ouvertement montreraient qu'ils sont ses ennemis, chose dont le peuple doit bien se garder. En effet, selon le for ancien de l’Espagne, tout homme qui souhaiterait voir la mort du Roy son seigneur et le dirait explicitement, et que la chose soit prouvée, doit mourir pour félon et perdre tous ses biens. Et si on voulait lui laisser la vie sauve, la plus grande grâce qu’on pourrait lui faire serait de lui arracher les yeux afin qu’ils ne puissent voir ce qu’il avait souhaité.
Loi II : Comment le peuple doit toujours vouloir entendre dire du bien du Roy, et non du mal.
L'ouïe, dont nous avons parlé dans la tRoysième loi avant celle-ci, est le deuxième sens que possède l’âme sensitive,. Et Dieu l’a placée très précisément à l’intérieur de l’oreille. En effet, de même que l’ouïe, lorsqu’elle est saine et non empêchée, perçoit de loin les sons et les voix, et prend plaisir à ceux qui sont agréables et délectables tandis qu'elle a horreur de ceux qui sont forts et épouvantables, de même, à l’image de cela, le peuple doit entendre volontiers et avec plaisir le bien que l’on dira du Roy, et s'efforcer de l’accroître autant qu’il le pourra.
Et il doit avoir horreur d'entendre dire du mal du Roy, et de surcroît s'en affliger lorsqu'il l'entend, le déplorer vivement, l’interdire à ceux qui le profèrent et faire tout son possible pour montrer que cela ne lui plaît pas. Et il ne doit en aucune façon souhaiter entendre dire ce qui pourrait être pour le Roy cause de préjudice, de mort ou de déshonneur ; car cela serait une des plus grandes félonies qui puissent être. Ceux qui auraient un tel souhait laisseraient supposer par là qu'ils seraient bien aises de voir ce mal se réaliser. Par conséquent, ils doivent recevoir une peine grevant corps et biens, à l'exemple de ce que nous avons déjà exposé dans la loi précédente.
Loi III : Comment le peuple doit sentir de loin ce qui est bien pour son Roy afin de l'attirer, et ce qui est mauvais afin de le rejeter.
L'odorat est le tRoysième sens que possède l’âme sensitive, et Dieu a expressément choisi de le placer dans le nez de l’homme. Et, de même que par ce sens, lorsqu’il est tout à fait sain, l’homme sent de loin les odeurs et distingue les bonnes des mauvaises, de même le peuple qui est sain doit semblablement demeurer loyal et sentir de loin les choses qui pourraient apporter bien et honneur au Roy et s’en réjouir grandement et les attirer autant qu’il le pourra et s’efforcer d'en faire lui-même. Et celles qui seraient pour le Roy cause de tort et de déshonneur, le peuple doit les avoir en horreur, et donc les repousser et les écarter autant qu’il le pourra, et n'en point faire lui-même en aucune façon, car ceux qui auraient le souhait de sentir le dommage et le déshonneur du Roy leur seigneur commettraient une félonie notoire, et doivent recevoir une peine à la mesure du dommage qu’ils ne voulurent pas empêcher alors qu'ils auraient pu le faire.
Loi IV : Comment le peuple doit se réjouir de la bonne renommée du Roy, et être peiné quand elle est mauvaise.
Le goût est le quatrième sens de l’âme sensitive, et Dieu l'a placé dans la bouche et plus précisément dans la langue. Et, de même que le goût distingue ce qui est doux de ce qui est amer, et se délecte des choses savoureuses tandis qu'il déteste les autres, et que la langue goûte et transmet toutes choses, de même, le peuple doit savourer la bonne renommée de son seigneur et la dire et la rapporter avec sa langue. Quant aux paroles qui seraient infamantes pour lui, le peuple doit refuser de les dire ou de les rapporter en aucune façon, et encore plus de les susciter ou d’en chercher de nouvelles ; car le peuple qui diffame son Roy en disant du mal de lui de sorte qu’il perde son haut prix et son grand renom, et de façon à ce que les hommes en viennent à le désaimer et à le haïr, commet une trahison notoire : c’est comme s’il le tuait. En effet, comme l’ont dit les sages qui ont fait les lois anciennes, il est deux fautes pour ainsi dire égales : tuer l’homme ou l’infamer pour quelque mal qu’il aurait fait, car l’homme, une fois infamé, fût-il innocent, est mort quant au bien et à l'honneur de ce monde.
Et de plus, l’infamation pourrait être telle que la mort vaudrait mieux pour lui que la vie. Aussi, ceux qui feraient cela doivent recevoir la même peine que s’ils l’avaient tué, tant dans leur corps que dans leurs biens. Et si on voulait leur faire la très grande grâce de leur laisser la vie sauve, on doit leur couper la langue avec laquelle ils ont médit, de sorte que plus jamais ils n’en puissent user.
Loi V : Comment le peuple doit toujours dire la vérité au Roy et se garder de lui mentir.
La langue, Dieu n’en a pas seulement doté l’homme pour qu’il goûte, mais aussi pour qu’il parle et puisse, grâce à elle, exposer son propos. Et de même qu’Il lui a donné avec le goût un sens pour distinguer les choses savoureuses de celles qui ne le sont pas, de même, Il lui en a donné un avec la parole pour qu’il fasse la distinction entre le mensonge, qui est amer et dont a horreur la nature — qui est saine et pleine de loyauté — et la vérité, à laquelle l’entendement de l’homme de bien prend plaisir et dont il se délecte. C'est pourquoi les sages ont dit que, semblablement, le peuple doit toujours adresser au Roy des paroles véritables et se garder de lui mentir sciemment soit par un mensonge simple soit par la flatterie, qui est un mensonge composé [déguisé]. Et quiconque dirait sciemment un mensonge au Roy pour qu’il fasse prendre quelqu’un ou qu’il sévisse sur son corps, en le tuant ou en le mutilant, celui-là doit recevoir sur son propre corps la même peine que celle causée par le mensonge qu’il aura dit. Nous disons de même s’il lui faisait perdre une partie de ses biens, meubles et immeubles.
Et le Roy ne doit pas garder à ses côtés celui qui lui dirait des paroles qu’il estimerait relever de la flatterie, et ce pour deux raisons. La première, afin que le flatteur ne trouve auprès du Roy la tolérance qui ferait grandir son mal. La seconde, afin que le Roy n’en vienne pas à cRoyre, par malheur, la flatterie qu’il lui adresserait et ne montre son manque d’entendement en réglant son action sur elle.
Loi VI : Comment le peuple doit toucher les choses qui seront au service et en l'honneur du Roy et non celles où il pourrait trouver mort, blessure ou déshonneur.
Le toucher est le cinquième sens de l'âme sensitive et bien qu’il soit présent dans tout le corps, il l’est principalement dans les pieds et les mains. Et de même que le toucher distingue les choses âpres des choses douces, les molles des dures, et les fRoydes des chaudes, de même, le peuple doit semblablement, allant avec ses pieds et travaillant de ses mains, oeuvrer aux choses qui seront douces et profitables à son Roy, et les rapprocher de celui-ci autant qu'il pourra. Quant aux choses âpres, dures et dommageables, il doit aller au-devant d'elles, et les briser, les détruire, de sorte que le Roy n'en reçoive aucun mal. Et, plus que tout au monde, le peuple doit se garder de toucher le Roy pour le tuer, le frapper, ou le prendre. En effet, ceux qui s'emploieraient à sa mort iraient contre le fait de Dieu, et contre son commandement, car ils tueraient celui qu'Il avait mis en ses lieu et place sur terre, car Lui-même a défendu que quiconque mette la main sur les Roys pour leur faire du mal. Et ce serait aussi agir contre le royaume, car il le priverait de la tête que Dieu lui avait donnée, et de la vie par laquelle tous vivent ensemble ; en outre ils feraient pour toujours la mauvaise renommée du royaume. Enfin, ils agiraient contre eux-mêmes, en tuant leur seigneur, qu'ils doivent garder plus que tout au monde, et ils porteraient à jamais l’injure de trahison contre eux et tout leur lignage. Aussi, tous ceux qui feraient une telle chose, ou tenteraient de la faire, seraient des traîtres, coupables de la plus haute trahison qui puisse être, et ils doivent mourir pour cela, de la manière la plus cruelle et la plus avilissante que l'on puisse concevoir ; et ils doivent perdre tous leurs biens, meubles et immeubles, lesquels doivent revenir au Roy. Quant aux maisons et aux terres cultivées, on doit les abattre et les gâter, de sorte qu’elles restent à jamais le signe d’un châtiment exemplaire. Item, nous disons que tous ceux qui conseilleront une telle chose, ou qui aideront, encourageront, ou protégeront les auteurs de ces actes, sont des traîtres, et doivent mourir pour cela et recevoir la peine susdite. Item, quiconque le saurait, de quelque manière que ce soit, et ne le dénoncerait pas, même si le forfait n'était pas consommé, est un traître, et doit mourir pour cela et perdre tous ses biens. Item, nous disons que quiconque frapperait le Roy avec une arme, même sans que mort s’ensuive, doit mourir pour cela et perdre tous ses biens, qui reviendront au Roy. Toutefois, on ne doit pas abattre ses maisons, ni gâter ses terres, comme nous l'avons dit plus haut. Et il doit recevoir cette peine parce qu’il apparaît clairement que, l’ayant frappé, il l'aurait tué s'il l'avait pu. Il en va de même s'il le frappait avec autre chose qu’une arme. Mais s'il venait à le prendre, il doit recevoir la même peine que s’il l'avait tué, parce que de même que par la mort il lui enlève le nom de son royaume, et l’en déshérite, de même, par l’emprisonnement, il le prive de son pouvoir de façon déshonorante. Nous disons que c'est cette même peine que doivent recevoir tous ceux qui conseilleront, aideront ou encourageront ceux qui feraient au Roy l'une ou l’autre des choses susdites.
Aristote et les autres sages ont conçu une similitude entre la deuxième âme, qu'ils ont appelée sensitive, et le Roy, montrant par là comment le peuple doit se comporter à son endRoyt. Ils ont dit que de même qu’en cette âme il y a dix sens, de même le peuple doit observer dix choses dans sa façon d'être et d'agir envers son Roy, afin de pleinement l'honorer, l'aimer et le garder. Aussi, puisque nous avons parlé dans le titre précédent de la manière dont le peuple doit connaître, aimer et craindre Dieu, nous voulons dire ici comment le peuple doit être envers son Roy, quant aux choses susdites, selon ce que les sages ont exposé, par similitude.
Loi I : Comment le peuple doit toujours désirer voir le bien pour son Roy et non le mal.
La vue est le premier des cinq sens externes à propos desquels Aristote et les autres sages ont conçu une similitude avec le peuple. En effet, de même que lorsque la vue est saine et claire, elle perçoit de loin les choses et en distingue les contours et les couleurs, de même le peuple doit voir et savoir que le nom du Roy vient de Dieu, que le Roy occupe ses lieu et place sur terre pour faire justice, dRoyt et grâce ; qu'il est, en outre, leur seigneur temporel, et eux ses vassaux, et qu'il doit les éduquer et les commander, tandis qu'eux doivent le servir et lui obéir. C’est pourquoi le peuple doit voir de loin les choses qui contribuent au bien, à l'honneur et à la sauvegarde du Roy, et faire diligence pour s'en saisir et les accroître ; quant à celles qui lui seraient nuisibles, il doit les repousser et les écarter autant qu'il le pourra. Et la chose qu’il doit désirer par-dessus tout et vouloir c’est la vie de son Roy, car elle contient toutes les autres. Voilà pourquoi le peuple loyal ne doit pas désirer sa mort, ni souhaiter la voir en aucune façon, car ceux qui le feraient ouvertement montreraient qu'ils sont ses ennemis, chose dont le peuple doit bien se garder. En effet, selon le for ancien de l’Espagne, tout homme qui souhaiterait voir la mort du Roy son seigneur et le dirait explicitement, et que la chose soit prouvée, doit mourir pour félon et perdre tous ses biens. Et si on voulait lui laisser la vie sauve, la plus grande grâce qu’on pourrait lui faire serait de lui arracher les yeux afin qu’ils ne puissent voir ce qu’il avait souhaité.
Loi II : Comment le peuple doit toujours vouloir entendre dire du bien du Roy, et non du mal.
L'ouïe, dont nous avons parlé dans la tRoysième loi avant celle-ci, est le deuxième sens que possède l’âme sensitive,. Et Dieu l’a placée très précisément à l’intérieur de l’oreille. En effet, de même que l’ouïe, lorsqu’elle est saine et non empêchée, perçoit de loin les sons et les voix, et prend plaisir à ceux qui sont agréables et délectables tandis qu'elle a horreur de ceux qui sont forts et épouvantables, de même, à l’image de cela, le peuple doit entendre volontiers et avec plaisir le bien que l’on dira du Roy, et s'efforcer de l’accroître autant qu’il le pourra.
Et il doit avoir horreur d'entendre dire du mal du Roy, et de surcroît s'en affliger lorsqu'il l'entend, le déplorer vivement, l’interdire à ceux qui le profèrent et faire tout son possible pour montrer que cela ne lui plaît pas. Et il ne doit en aucune façon souhaiter entendre dire ce qui pourrait être pour le Roy cause de préjudice, de mort ou de déshonneur ; car cela serait une des plus grandes félonies qui puissent être. Ceux qui auraient un tel souhait laisseraient supposer par là qu'ils seraient bien aises de voir ce mal se réaliser. Par conséquent, ils doivent recevoir une peine grevant corps et biens, à l'exemple de ce que nous avons déjà exposé dans la loi précédente.
Loi III : Comment le peuple doit sentir de loin ce qui est bien pour son Roy afin de l'attirer, et ce qui est mauvais afin de le rejeter.
L'odorat est le tRoysième sens que possède l’âme sensitive, et Dieu a expressément choisi de le placer dans le nez de l’homme. Et, de même que par ce sens, lorsqu’il est tout à fait sain, l’homme sent de loin les odeurs et distingue les bonnes des mauvaises, de même le peuple qui est sain doit semblablement demeurer loyal et sentir de loin les choses qui pourraient apporter bien et honneur au Roy et s’en réjouir grandement et les attirer autant qu’il le pourra et s’efforcer d'en faire lui-même. Et celles qui seraient pour le Roy cause de tort et de déshonneur, le peuple doit les avoir en horreur, et donc les repousser et les écarter autant qu’il le pourra, et n'en point faire lui-même en aucune façon, car ceux qui auraient le souhait de sentir le dommage et le déshonneur du Roy leur seigneur commettraient une félonie notoire, et doivent recevoir une peine à la mesure du dommage qu’ils ne voulurent pas empêcher alors qu'ils auraient pu le faire.
Loi IV : Comment le peuple doit se réjouir de la bonne renommée du Roy, et être peiné quand elle est mauvaise.
Le goût est le quatrième sens de l’âme sensitive, et Dieu l'a placé dans la bouche et plus précisément dans la langue. Et, de même que le goût distingue ce qui est doux de ce qui est amer, et se délecte des choses savoureuses tandis qu'il déteste les autres, et que la langue goûte et transmet toutes choses, de même, le peuple doit savourer la bonne renommée de son seigneur et la dire et la rapporter avec sa langue. Quant aux paroles qui seraient infamantes pour lui, le peuple doit refuser de les dire ou de les rapporter en aucune façon, et encore plus de les susciter ou d’en chercher de nouvelles ; car le peuple qui diffame son Roy en disant du mal de lui de sorte qu’il perde son haut prix et son grand renom, et de façon à ce que les hommes en viennent à le désaimer et à le haïr, commet une trahison notoire : c’est comme s’il le tuait. En effet, comme l’ont dit les sages qui ont fait les lois anciennes, il est deux fautes pour ainsi dire égales : tuer l’homme ou l’infamer pour quelque mal qu’il aurait fait, car l’homme, une fois infamé, fût-il innocent, est mort quant au bien et à l'honneur de ce monde.
Et de plus, l’infamation pourrait être telle que la mort vaudrait mieux pour lui que la vie. Aussi, ceux qui feraient cela doivent recevoir la même peine que s’ils l’avaient tué, tant dans leur corps que dans leurs biens. Et si on voulait leur faire la très grande grâce de leur laisser la vie sauve, on doit leur couper la langue avec laquelle ils ont médit, de sorte que plus jamais ils n’en puissent user.
Loi V : Comment le peuple doit toujours dire la vérité au Roy et se garder de lui mentir.
La langue, Dieu n’en a pas seulement doté l’homme pour qu’il goûte, mais aussi pour qu’il parle et puisse, grâce à elle, exposer son propos. Et de même qu’Il lui a donné avec le goût un sens pour distinguer les choses savoureuses de celles qui ne le sont pas, de même, Il lui en a donné un avec la parole pour qu’il fasse la distinction entre le mensonge, qui est amer et dont a horreur la nature — qui est saine et pleine de loyauté — et la vérité, à laquelle l’entendement de l’homme de bien prend plaisir et dont il se délecte. C'est pourquoi les sages ont dit que, semblablement, le peuple doit toujours adresser au Roy des paroles véritables et se garder de lui mentir sciemment soit par un mensonge simple soit par la flatterie, qui est un mensonge composé [déguisé]. Et quiconque dirait sciemment un mensonge au Roy pour qu’il fasse prendre quelqu’un ou qu’il sévisse sur son corps, en le tuant ou en le mutilant, celui-là doit recevoir sur son propre corps la même peine que celle causée par le mensonge qu’il aura dit. Nous disons de même s’il lui faisait perdre une partie de ses biens, meubles et immeubles.
Et le Roy ne doit pas garder à ses côtés celui qui lui dirait des paroles qu’il estimerait relever de la flatterie, et ce pour deux raisons. La première, afin que le flatteur ne trouve auprès du Roy la tolérance qui ferait grandir son mal. La seconde, afin que le Roy n’en vienne pas à cRoyre, par malheur, la flatterie qu’il lui adresserait et ne montre son manque d’entendement en réglant son action sur elle.
Loi VI : Comment le peuple doit toucher les choses qui seront au service et en l'honneur du Roy et non celles où il pourrait trouver mort, blessure ou déshonneur.
Le toucher est le cinquième sens de l'âme sensitive et bien qu’il soit présent dans tout le corps, il l’est principalement dans les pieds et les mains. Et de même que le toucher distingue les choses âpres des choses douces, les molles des dures, et les fRoydes des chaudes, de même, le peuple doit semblablement, allant avec ses pieds et travaillant de ses mains, oeuvrer aux choses qui seront douces et profitables à son Roy, et les rapprocher de celui-ci autant qu'il pourra. Quant aux choses âpres, dures et dommageables, il doit aller au-devant d'elles, et les briser, les détruire, de sorte que le Roy n'en reçoive aucun mal. Et, plus que tout au monde, le peuple doit se garder de toucher le Roy pour le tuer, le frapper, ou le prendre. En effet, ceux qui s'emploieraient à sa mort iraient contre le fait de Dieu, et contre son commandement, car ils tueraient celui qu'Il avait mis en ses lieu et place sur terre, car Lui-même a défendu que quiconque mette la main sur les Roys pour leur faire du mal. Et ce serait aussi agir contre le royaume, car il le priverait de la tête que Dieu lui avait donnée, et de la vie par laquelle tous vivent ensemble ; en outre ils feraient pour toujours la mauvaise renommée du royaume. Enfin, ils agiraient contre eux-mêmes, en tuant leur seigneur, qu'ils doivent garder plus que tout au monde, et ils porteraient à jamais l’injure de trahison contre eux et tout leur lignage. Aussi, tous ceux qui feraient une telle chose, ou tenteraient de la faire, seraient des traîtres, coupables de la plus haute trahison qui puisse être, et ils doivent mourir pour cela, de la manière la plus cruelle et la plus avilissante que l'on puisse concevoir ; et ils doivent perdre tous leurs biens, meubles et immeubles, lesquels doivent revenir au Roy. Quant aux maisons et aux terres cultivées, on doit les abattre et les gâter, de sorte qu’elles restent à jamais le signe d’un châtiment exemplaire. Item, nous disons que tous ceux qui conseilleront une telle chose, ou qui aideront, encourageront, ou protégeront les auteurs de ces actes, sont des traîtres, et doivent mourir pour cela et recevoir la peine susdite. Item, quiconque le saurait, de quelque manière que ce soit, et ne le dénoncerait pas, même si le forfait n'était pas consommé, est un traître, et doit mourir pour cela et perdre tous ses biens. Item, nous disons que quiconque frapperait le Roy avec une arme, même sans que mort s’ensuive, doit mourir pour cela et perdre tous ses biens, qui reviendront au Roy. Toutefois, on ne doit pas abattre ses maisons, ni gâter ses terres, comme nous l'avons dit plus haut. Et il doit recevoir cette peine parce qu’il apparaît clairement que, l’ayant frappé, il l'aurait tué s'il l'avait pu. Il en va de même s'il le frappait avec autre chose qu’une arme. Mais s'il venait à le prendre, il doit recevoir la même peine que s’il l'avait tué, parce que de même que par la mort il lui enlève le nom de son royaume, et l’en déshérite, de même, par l’emprisonnement, il le prive de son pouvoir de façon déshonorante. Nous disons que c'est cette même peine que doivent recevoir tous ceux qui conseilleront, aideront ou encourageront ceux qui feraient au Roy l'une ou l’autre des choses susdites.
Drizzten- Frère de l'Ordre
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Re: Le peuple et le Roy
Loi VII : Comment le peuple doit bien servir le Roy et se garder du contraire.
Nous avons montré, dans les lois précédentes, comment les sages ont assimilé le peuple aux cinq sens par lesquels l'âme sensitive agit au-dehors, pour ce qui est des choses qu'il est tenu d'observer afin de pleinement honorer, aimer et garder le Roy. Mais nous voulons dire à présent quels sont les cinq autres sens, qui sont internes et ne sont pas apparents. Le premier est appelé sens commun, auquel tous les autres apportent ce qu’ils sentent : la vue ce qu’elle voit, et l'ouie ce qu’elle entend, et ainsi pour chacun des autres. Et le sens commun, en tant que sens principal, juge de ce dont il s’agit, de son aspect ou de sa couleur. De même, le peuple doit agir semblablement avec le Roy en le conseillant et en le servant en toutes choses dont il aura besoin, chacun selon ses facultés, et selon la place qu'il occupera, et chacun doit être reconnu et récompensé par le Roy, selon sa valeur et son mérite. C’est pourquoi, ceux qui sciemment le conseilleraient mal en lui faisant prendre une chose pour une autre, soit en grossissant ce qui pourrait pourtant être accompli aisément — l’obligeant ainsi à y engager grands frais et grands débours — soit en lui présentant comme aisé quelque chose d’ardu, ceux-là commettraient une faute grave et doivent recevoir une très lourde peine. Et si celui qui commettait une telle faute était une personne de condition, il doit être banni du pays et perdre tous ses biens. Et s'il était de rang inférieur, il doit mourir pour cela. nous disons que ceux qui ne seraient pas reconnaissants au Roy ou ne le serviraient pas, pour les faveurs qu’il leur aurait accordées, feraient manifestement un si grand tort que, à cause de ce manque de gratitude, ils doivent perdre son amour, et parce qu’ils ne l’ont point servi, ils doivent perdre ses bienfaits.
Loi VIII : Comment le peuple doit agir dans les affaires du Roy avec calme et bon sens, et non point hâtivement, selon ses lubies.
La fantaisie est le deuxième des sens internes par lesquels l'âme sensitive agit, et elle se définit comme une lubie toute déraisonnable. En effet, cette vertu juge aussitôt les choses hâtivement, et indûment, sans tenir compte du passé, ni de ce qui peut advenir par la suite. Donc, semblablement, pour tout ce qui concerne le Roy, le peuple ne doit pas agir de façon hâtive ni selon ses lubies mais avec calme, bon sens et selon la raison, à savoir qu’il ne cRoyra personne qui dira du mal du Roy en forme de malin propos susceptible de porter les volontés à ne pas l’aimer comme il le doit, et qu’il ne cRoyra pas que les choses que le Roy fera à son profit et pour son bien sont faites à son dommage ou avec l’intention de nuire. Et le peuple doit bien se garder de cela, car de même que ceux qui s’en remettent à la fantaisie en toute occasion sont voués à la folie, de même, ceux qui cRoyent ces malins propos tenus contre leurs seigneurs perdent leur loyauté, et feront forcément des choses qui les voueront à la trahison et à la félonie. Aussi, ceux qui cRoyront de telles paroles sur le Roy, et agiront selon elles, doivent recevoir une peine à la mesure des conséquences de l’acte qui s’ensuivrait. Et quand ils n’agiraient pas selon elles, par le seul fait d’y avoir prêté l’oreille et de les avoir crues, ils doivent être bannis du royaume aussi longtemps que le Roy le jugera bon. Et en outre, les sages ont associé par similitude à la fantaisie, une autre chose dont le peuple doit bien se garder. Et ce serait le cas de quelqu’un qui, ne se connaissant pas lui-même, demanderait au Roy une chose qu'il ne méritait point, ni pour un service qu'il aurait accompli, ni pour une autre bonne raison, parce qu’il aurait la lubie de cRoyre que cela lui était dû; ou de quelqu’un qui altérerait les faits de façon mensongère en faisant cRoyre au Roy que ce qui était grand était peu de chose, ou que ce qui revenait de dRoyt à quelqu'un, il pourrait le lui donner à lui-même, ou à un autre[...]
Loi IX: Comment le peuple doit penser et connaître les choses qu'il faut faire pour le bien du Roy et repousser et écarter celles qui lui sont dommageables.
On appelle imagination le tRoysième sens de l'âme sensitive et elle est plus puissante que la fantaisie, dont nous avons parlé dans la loi précédente, car elle s'emploie à produire des images sur les choses passées, sur celles du présent et sur celles qui sont à venir. De même, le peuple doit semblablement considérer les faits et les choses qui concernent le Roy, en examinant ceux du passé et ceux du présent car, grâce à eux, il peut savoir comment s'y prendre avec ceux qui adviendront par la suite. Et ce qui, selon lui, sera bon pour le Roy, il doit s'efforcer de le lui procurer et de faire en sorte que cela s'accomplisse. Et ce qui, selon lui, est ou pourra être mauvais ou dommageable pour lui, il doit le repousser, et faire en sorte que cela n'advienne point. Ceux, en effet, qui auraient connaissance d'un mal ou d'un dommage qui menacerait leur seigneur et ne l'écarteraient pas de lui, commettraient une trahison notoire, pour laquelle ils doivent recevoir une peine grevant corps et biens à la mesure du mal qu'ils n'ont pas voulu empêcher alors qu'ils auraient pu le faire. Et comme cette imagination porte quelquefois sur les choses qui ne sont ni ne pourraient être, semblablement, les sages ont disposé que le peuple doit se garder d'inciter le Roy à entreprendre les choses impossibles, et ce, afin de ne pas lui faire dépenser en vain son avoir, ni lui faire perdre son temps. Ceux, en effet, qui le feraient sciemment, commettraient une félonie notoire puisqu'ils portent préjudice à leur seigneur et l'exposent à la moquerie. S'il s'agit d'un noble, il doit pour le préjudice payer le double du montant de celui-ci, et pour la moquerie être banni du pays en étant moqué luimême. Et s'il n'a pas de quoi payer, il doit perdre tous ses biens. Et s'il s'agit d'un homme de moindre condition, il doit mourir pour cela.
Loi X: Comment le peuple doit estimer les choses qui seront propices à la vie et à la santé du Roy, les faire, les lui procurer, ne pas être l'auteur de celles qui sont contraires à cela et prendre garde à ce que nul autre ne les fasse.
On appelle vertu estimative le quatrième sens, qui estime et permet de comprendre naturellement au vu de chaque chose laquelle est amicale et propice, et laquelle est hostile et dommageable. Et semblablement, les sages ont dit que le peuple doit estimer et connaître les choses qui sont comme amicales et propices à la vie et à la santé du Roy, et les lui procurer et les accomplir de toutes les manières possibles. Quant à celles qui lui seraient contraires et qui pourraient causer sa mort ou sa maladie, nul ne doit les faire ni conseiller à un autre qu'il les fasse. Ceux, en effet, qui sciemment les feraient ou ne les empêcheraient pas autant qu'il est possible, commettraient une félonie notoire pour laquelle ils doivent mourir et perdre leurs biens.
(fragment manquant)
Loi XVII. Comment le peuple doit honorer le Roy par la parole.
Honneur veut dire la dignité marquée par la considération que reçoit l’homme eu égard à la place qu’il occupe, aux actes notoires qu’il accomplit, ou à la vertu qu’il possède. Et ceux à qui Dieu accorde un honneur intact parviennent au meilleur état auquel ils puissent parvenir ici-bas, et s’y maintiennent en ce monde et dans l’autre. Il en est ainsi lorsqu’ils le gagnent conformément au dRoyt et à la raison, en gravissant les échelons un à un et en obtenant des charges chaque fois plus hautes, où ils s’affermissent et s’enracinent, et que les hommes jugent qu’ils le méritent et sont en dRoyt d’être honorés.
Il appartient donc aux peuples de rendre un tel honneur tout particulièrement à leur Roy, pour toutes les raisons dont nous avons parlé plus haut ; d’une part, en vertu de la reconnaissance qu’ils lui doivent, d’autre part, en vertu de l’amour, ou encore, parce qu’ils doivent le craindre. De même, parce qu’ils sont tenus de le révérer et de lui obéir, et qu’en agissant ainsi, ils l’honoreront pleinement. Et en honorant le Roy, ils s’honorent eux-mêmes, ils honorent le pays où ils vivent, et commettent un acte de loyauté notoire pour lequel ils doivent recevoir biens et honneurs du Roy, comme l’ont dit les sages : honorons ceux qui peuvent nous honorer, ce qui concorde aussi avec ce qu’a dit l’apôtre saint Pierre, « Craignez Dieu et honorez votre Roy ».
Mais cet honneur dont nous avons parlé doit être rendu de deux façons premièrement, par la parole; deuxièmement, par les actes et la parole. En effet, ils doivent veiller à ne dire en présence du Roy que des paroles véritables, élégantes, bienfaisantes et humbles, et écarter celles qui seront mensongères, inélégantes, malfaisantes et arrogantes, car les bonnes paroles haussent l’honneur du Roy et les mauvaises, que le peuple doit grandement se garder de dire, l’abaissent.
Par conséquent, ceux qui diraient sciemment des paroles qui seraient pour le Roy cause de déshonneur ou d’infamie [qui déshonoreraient ou aviliraient le Roy] se rendraient coupables de trahison, car nul homme ne peut déshonorer son seigneur par la parole ou par les actes sans être accusé de traîtrise, et ceux qui le font doivent recevoir une peine à la mesure de leurs paroles.
Loi XVIII. Comment le peuple doit honorer le Roy par ses actes.
Le peuple doit non seulement honorer le Roy par la parole, comme nous l’avons dit dans la loi précédente, mais aussi par ses actes. Et bien que l’honneur issu de la parole soit grand, celui qui vient de l’acte l’est encore plus, et le premier [l’un] serait imparfait [incomplet] sans le second [l’autre]. Il faut donc que les paroles et les actes concordent, car dans le cas contraire, il adviendrait ce qu’a dit Notre-Seigneur à travers la voix du prophète Esaïe : « Ce peuple m’honore avec ses lèvres mais son coeur est loin de moi ».
Le peuple doit donc honorer le Roy par ses actes, comme l’a dit Aristote, quelle que soit la façon dont il s’adresse à lui, qu’il soit assis, debout, en train de marcher, allongé, en train de s’asseoir, et il ne doit pas avoir l’audace de se mettre à sa hauteur, ni s’asseoir de façon à lui tourner le dos, ni lui parler à l’oreille quand il est debout alors que le Roy est assis. Il doit aussi honorer le Roy quand celui-ci est debout et ne pas chercher à se mettre à sa hauteur ou plus haut pour s’adresser à lui, mais veiller plutôt à se trouver plus bas que lui ou s’agenouiller humblement devant lui. Il est même jugé bon que ceux qui seraient assis se lèvent à sa venue [quand il arrive], et quand il est en prière, que seuls s’interposent entre lui et le lieu en direction duquel il prie ceux qui auraient à dire les oraisons. De même, le Roy doit être honoré lorsqu’il se déplace à pied ou à cheval, de sorte que personne, à l’exception de celui qu’il aura nommé, ne se trouve devant lui, ni trop près, ni à sa hauteur, ni ne mette sa jambe sur la tête de son cheval lorsqu’il chevauche à ses côtés. Et quand il met pied à terre, seuls doivent mettre pied à terre ceux qu’il nommera et dont il jugera bon qu’ils le fassent. Et seul peut chevaucher la monture du Roy celui à qui il en a donné l’ordre ou à qui il l’a cédée.
De même, lorsqu’il est allongé, les sages ont dit qu’il faut l’honorer, et que personne ne doit s’allonger à côté de lui ni prendre sa place quand il n’est pas dans son lit, ni se permettre de monter ou de passer sur lui quand il dort.
Dans toutes ces situations et dans d’autres semblables, les sages ont dit que le peuple doit honorer le Roy et le mettre en valeur. Ils l’ont dit en montrant que ce qui a de la valeur est plus estimable et que ce qui est grossier est vil et méprisable. C’est ce qu’a voulu dire l’apôtre saint Paul aux autres apôtres : ‘si nous sommes tenus de nous honorer les uns les autres, nous le devons d’autant plus aux Roys qui sont nos seigneurs’.Aussi, pour toutes les raisons susdites, a-t-on ordonné aux peuples qu’ils honorent non seulement le Roy en sa présence mais aussi toutes ses effigies (représentations), que ce soient les statues faites à son image ou ses portraits. C’est pourquoi on a établi jadis que ceux qui fuiraient ces effigies (représentations) pour une faute qu’ils auraient commise, ne devaient être emprisonnés ou torturés que sur l’ordre du Roy. Et il en a été ainsi parce que toutes ces choses, aussi bien l’effigie du Roy que son sceau où apparaît son portrait, l’emblème qu’il porte sur ses armes, sa monnaie, ou sa lettre où apparaît son nom, doivent être grandement honorées car elles le représentent là où il n’est pas. Par conséquent, quiconque n’honorerait pas son Roy dans toutes les choses dont parle cette loi montrerait clairement qu’il ne le reconnaît pas, ne l’aime pas, et ne le craint pas, et qu’il ne le révère pas et n’a point le souhait de l’honorer. Et celui qui le ferait sciemment se rendrait coupable de félonie notoire et doit recevoir la peine qui lui correspond : si c’est un homme de haut rang et que le déshonneur atteint la personne du Roy, il doit être banni pour toujours et perdre les biens que le Roy lui a donnés ; et si c’est un homme de moindre condition, il doit mourir pour cela.
Document de l'Université.
Etudiant : lockarius
Maître : FrèreNico
source : http://www.ens-lsh.fr/labo/sirem/pdf/partidas-pdf/P2_T13.pdf
Nous avons montré, dans les lois précédentes, comment les sages ont assimilé le peuple aux cinq sens par lesquels l'âme sensitive agit au-dehors, pour ce qui est des choses qu'il est tenu d'observer afin de pleinement honorer, aimer et garder le Roy. Mais nous voulons dire à présent quels sont les cinq autres sens, qui sont internes et ne sont pas apparents. Le premier est appelé sens commun, auquel tous les autres apportent ce qu’ils sentent : la vue ce qu’elle voit, et l'ouie ce qu’elle entend, et ainsi pour chacun des autres. Et le sens commun, en tant que sens principal, juge de ce dont il s’agit, de son aspect ou de sa couleur. De même, le peuple doit agir semblablement avec le Roy en le conseillant et en le servant en toutes choses dont il aura besoin, chacun selon ses facultés, et selon la place qu'il occupera, et chacun doit être reconnu et récompensé par le Roy, selon sa valeur et son mérite. C’est pourquoi, ceux qui sciemment le conseilleraient mal en lui faisant prendre une chose pour une autre, soit en grossissant ce qui pourrait pourtant être accompli aisément — l’obligeant ainsi à y engager grands frais et grands débours — soit en lui présentant comme aisé quelque chose d’ardu, ceux-là commettraient une faute grave et doivent recevoir une très lourde peine. Et si celui qui commettait une telle faute était une personne de condition, il doit être banni du pays et perdre tous ses biens. Et s'il était de rang inférieur, il doit mourir pour cela. nous disons que ceux qui ne seraient pas reconnaissants au Roy ou ne le serviraient pas, pour les faveurs qu’il leur aurait accordées, feraient manifestement un si grand tort que, à cause de ce manque de gratitude, ils doivent perdre son amour, et parce qu’ils ne l’ont point servi, ils doivent perdre ses bienfaits.
Loi VIII : Comment le peuple doit agir dans les affaires du Roy avec calme et bon sens, et non point hâtivement, selon ses lubies.
La fantaisie est le deuxième des sens internes par lesquels l'âme sensitive agit, et elle se définit comme une lubie toute déraisonnable. En effet, cette vertu juge aussitôt les choses hâtivement, et indûment, sans tenir compte du passé, ni de ce qui peut advenir par la suite. Donc, semblablement, pour tout ce qui concerne le Roy, le peuple ne doit pas agir de façon hâtive ni selon ses lubies mais avec calme, bon sens et selon la raison, à savoir qu’il ne cRoyra personne qui dira du mal du Roy en forme de malin propos susceptible de porter les volontés à ne pas l’aimer comme il le doit, et qu’il ne cRoyra pas que les choses que le Roy fera à son profit et pour son bien sont faites à son dommage ou avec l’intention de nuire. Et le peuple doit bien se garder de cela, car de même que ceux qui s’en remettent à la fantaisie en toute occasion sont voués à la folie, de même, ceux qui cRoyent ces malins propos tenus contre leurs seigneurs perdent leur loyauté, et feront forcément des choses qui les voueront à la trahison et à la félonie. Aussi, ceux qui cRoyront de telles paroles sur le Roy, et agiront selon elles, doivent recevoir une peine à la mesure des conséquences de l’acte qui s’ensuivrait. Et quand ils n’agiraient pas selon elles, par le seul fait d’y avoir prêté l’oreille et de les avoir crues, ils doivent être bannis du royaume aussi longtemps que le Roy le jugera bon. Et en outre, les sages ont associé par similitude à la fantaisie, une autre chose dont le peuple doit bien se garder. Et ce serait le cas de quelqu’un qui, ne se connaissant pas lui-même, demanderait au Roy une chose qu'il ne méritait point, ni pour un service qu'il aurait accompli, ni pour une autre bonne raison, parce qu’il aurait la lubie de cRoyre que cela lui était dû; ou de quelqu’un qui altérerait les faits de façon mensongère en faisant cRoyre au Roy que ce qui était grand était peu de chose, ou que ce qui revenait de dRoyt à quelqu'un, il pourrait le lui donner à lui-même, ou à un autre[...]
Loi IX: Comment le peuple doit penser et connaître les choses qu'il faut faire pour le bien du Roy et repousser et écarter celles qui lui sont dommageables.
On appelle imagination le tRoysième sens de l'âme sensitive et elle est plus puissante que la fantaisie, dont nous avons parlé dans la loi précédente, car elle s'emploie à produire des images sur les choses passées, sur celles du présent et sur celles qui sont à venir. De même, le peuple doit semblablement considérer les faits et les choses qui concernent le Roy, en examinant ceux du passé et ceux du présent car, grâce à eux, il peut savoir comment s'y prendre avec ceux qui adviendront par la suite. Et ce qui, selon lui, sera bon pour le Roy, il doit s'efforcer de le lui procurer et de faire en sorte que cela s'accomplisse. Et ce qui, selon lui, est ou pourra être mauvais ou dommageable pour lui, il doit le repousser, et faire en sorte que cela n'advienne point. Ceux, en effet, qui auraient connaissance d'un mal ou d'un dommage qui menacerait leur seigneur et ne l'écarteraient pas de lui, commettraient une trahison notoire, pour laquelle ils doivent recevoir une peine grevant corps et biens à la mesure du mal qu'ils n'ont pas voulu empêcher alors qu'ils auraient pu le faire. Et comme cette imagination porte quelquefois sur les choses qui ne sont ni ne pourraient être, semblablement, les sages ont disposé que le peuple doit se garder d'inciter le Roy à entreprendre les choses impossibles, et ce, afin de ne pas lui faire dépenser en vain son avoir, ni lui faire perdre son temps. Ceux, en effet, qui le feraient sciemment, commettraient une félonie notoire puisqu'ils portent préjudice à leur seigneur et l'exposent à la moquerie. S'il s'agit d'un noble, il doit pour le préjudice payer le double du montant de celui-ci, et pour la moquerie être banni du pays en étant moqué luimême. Et s'il n'a pas de quoi payer, il doit perdre tous ses biens. Et s'il s'agit d'un homme de moindre condition, il doit mourir pour cela.
Loi X: Comment le peuple doit estimer les choses qui seront propices à la vie et à la santé du Roy, les faire, les lui procurer, ne pas être l'auteur de celles qui sont contraires à cela et prendre garde à ce que nul autre ne les fasse.
On appelle vertu estimative le quatrième sens, qui estime et permet de comprendre naturellement au vu de chaque chose laquelle est amicale et propice, et laquelle est hostile et dommageable. Et semblablement, les sages ont dit que le peuple doit estimer et connaître les choses qui sont comme amicales et propices à la vie et à la santé du Roy, et les lui procurer et les accomplir de toutes les manières possibles. Quant à celles qui lui seraient contraires et qui pourraient causer sa mort ou sa maladie, nul ne doit les faire ni conseiller à un autre qu'il les fasse. Ceux, en effet, qui sciemment les feraient ou ne les empêcheraient pas autant qu'il est possible, commettraient une félonie notoire pour laquelle ils doivent mourir et perdre leurs biens.
(fragment manquant)
Loi XVII. Comment le peuple doit honorer le Roy par la parole.
Honneur veut dire la dignité marquée par la considération que reçoit l’homme eu égard à la place qu’il occupe, aux actes notoires qu’il accomplit, ou à la vertu qu’il possède. Et ceux à qui Dieu accorde un honneur intact parviennent au meilleur état auquel ils puissent parvenir ici-bas, et s’y maintiennent en ce monde et dans l’autre. Il en est ainsi lorsqu’ils le gagnent conformément au dRoyt et à la raison, en gravissant les échelons un à un et en obtenant des charges chaque fois plus hautes, où ils s’affermissent et s’enracinent, et que les hommes jugent qu’ils le méritent et sont en dRoyt d’être honorés.
Il appartient donc aux peuples de rendre un tel honneur tout particulièrement à leur Roy, pour toutes les raisons dont nous avons parlé plus haut ; d’une part, en vertu de la reconnaissance qu’ils lui doivent, d’autre part, en vertu de l’amour, ou encore, parce qu’ils doivent le craindre. De même, parce qu’ils sont tenus de le révérer et de lui obéir, et qu’en agissant ainsi, ils l’honoreront pleinement. Et en honorant le Roy, ils s’honorent eux-mêmes, ils honorent le pays où ils vivent, et commettent un acte de loyauté notoire pour lequel ils doivent recevoir biens et honneurs du Roy, comme l’ont dit les sages : honorons ceux qui peuvent nous honorer, ce qui concorde aussi avec ce qu’a dit l’apôtre saint Pierre, « Craignez Dieu et honorez votre Roy ».
Mais cet honneur dont nous avons parlé doit être rendu de deux façons premièrement, par la parole; deuxièmement, par les actes et la parole. En effet, ils doivent veiller à ne dire en présence du Roy que des paroles véritables, élégantes, bienfaisantes et humbles, et écarter celles qui seront mensongères, inélégantes, malfaisantes et arrogantes, car les bonnes paroles haussent l’honneur du Roy et les mauvaises, que le peuple doit grandement se garder de dire, l’abaissent.
Par conséquent, ceux qui diraient sciemment des paroles qui seraient pour le Roy cause de déshonneur ou d’infamie [qui déshonoreraient ou aviliraient le Roy] se rendraient coupables de trahison, car nul homme ne peut déshonorer son seigneur par la parole ou par les actes sans être accusé de traîtrise, et ceux qui le font doivent recevoir une peine à la mesure de leurs paroles.
Loi XVIII. Comment le peuple doit honorer le Roy par ses actes.
Le peuple doit non seulement honorer le Roy par la parole, comme nous l’avons dit dans la loi précédente, mais aussi par ses actes. Et bien que l’honneur issu de la parole soit grand, celui qui vient de l’acte l’est encore plus, et le premier [l’un] serait imparfait [incomplet] sans le second [l’autre]. Il faut donc que les paroles et les actes concordent, car dans le cas contraire, il adviendrait ce qu’a dit Notre-Seigneur à travers la voix du prophète Esaïe : « Ce peuple m’honore avec ses lèvres mais son coeur est loin de moi ».
Le peuple doit donc honorer le Roy par ses actes, comme l’a dit Aristote, quelle que soit la façon dont il s’adresse à lui, qu’il soit assis, debout, en train de marcher, allongé, en train de s’asseoir, et il ne doit pas avoir l’audace de se mettre à sa hauteur, ni s’asseoir de façon à lui tourner le dos, ni lui parler à l’oreille quand il est debout alors que le Roy est assis. Il doit aussi honorer le Roy quand celui-ci est debout et ne pas chercher à se mettre à sa hauteur ou plus haut pour s’adresser à lui, mais veiller plutôt à se trouver plus bas que lui ou s’agenouiller humblement devant lui. Il est même jugé bon que ceux qui seraient assis se lèvent à sa venue [quand il arrive], et quand il est en prière, que seuls s’interposent entre lui et le lieu en direction duquel il prie ceux qui auraient à dire les oraisons. De même, le Roy doit être honoré lorsqu’il se déplace à pied ou à cheval, de sorte que personne, à l’exception de celui qu’il aura nommé, ne se trouve devant lui, ni trop près, ni à sa hauteur, ni ne mette sa jambe sur la tête de son cheval lorsqu’il chevauche à ses côtés. Et quand il met pied à terre, seuls doivent mettre pied à terre ceux qu’il nommera et dont il jugera bon qu’ils le fassent. Et seul peut chevaucher la monture du Roy celui à qui il en a donné l’ordre ou à qui il l’a cédée.
De même, lorsqu’il est allongé, les sages ont dit qu’il faut l’honorer, et que personne ne doit s’allonger à côté de lui ni prendre sa place quand il n’est pas dans son lit, ni se permettre de monter ou de passer sur lui quand il dort.
Dans toutes ces situations et dans d’autres semblables, les sages ont dit que le peuple doit honorer le Roy et le mettre en valeur. Ils l’ont dit en montrant que ce qui a de la valeur est plus estimable et que ce qui est grossier est vil et méprisable. C’est ce qu’a voulu dire l’apôtre saint Paul aux autres apôtres : ‘si nous sommes tenus de nous honorer les uns les autres, nous le devons d’autant plus aux Roys qui sont nos seigneurs’.Aussi, pour toutes les raisons susdites, a-t-on ordonné aux peuples qu’ils honorent non seulement le Roy en sa présence mais aussi toutes ses effigies (représentations), que ce soient les statues faites à son image ou ses portraits. C’est pourquoi on a établi jadis que ceux qui fuiraient ces effigies (représentations) pour une faute qu’ils auraient commise, ne devaient être emprisonnés ou torturés que sur l’ordre du Roy. Et il en a été ainsi parce que toutes ces choses, aussi bien l’effigie du Roy que son sceau où apparaît son portrait, l’emblème qu’il porte sur ses armes, sa monnaie, ou sa lettre où apparaît son nom, doivent être grandement honorées car elles le représentent là où il n’est pas. Par conséquent, quiconque n’honorerait pas son Roy dans toutes les choses dont parle cette loi montrerait clairement qu’il ne le reconnaît pas, ne l’aime pas, et ne le craint pas, et qu’il ne le révère pas et n’a point le souhait de l’honorer. Et celui qui le ferait sciemment se rendrait coupable de félonie notoire et doit recevoir la peine qui lui correspond : si c’est un homme de haut rang et que le déshonneur atteint la personne du Roy, il doit être banni pour toujours et perdre les biens que le Roy lui a donnés ; et si c’est un homme de moindre condition, il doit mourir pour cela.
Document de l'Université.
Etudiant : lockarius
Maître : FrèreNico
source : http://www.ens-lsh.fr/labo/sirem/pdf/partidas-pdf/P2_T13.pdf
Drizzten- Frère de l'Ordre
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