CHAPITRE IX. Dans quelles circonstances il faut employer la ruse ou la force ouverte.
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CHAPITRE IX. Dans quelles circonstances il faut employer la ruse ou la force ouverte.
CHAPITRE IX.
Dans quelles circonstances il faut employer la ruse ou la force ouverte.
En lisant cet ouvrage, qui n'est qu'un abrégé des meilleurs auteurs militaires, on désire assez naturellement d'arriver au moment du combat, et d'en apprendre les règles ; mais, comme ce combat se décide ordinairement en deux ou trois heures, après quoi le vaincu reste sans espoir, il faut examiner, tenter et exécuter tout ce qui est possible, avant que d'en venir à ce moment critique : aussi les grands généraux sont ceux qui trouvent le moyen d'épouvanter l'ennemi sans exposer leurs troupes au hasard d'une bataille ; parce que le péril se partage nécessairement entre les deux partis. Voici ces moyens que j'ai tirés de nos anciens militaires. Un des plus utiles pour un général, est de s'entretenir souvent avec des officiers intelligents et expérimentés, de ses forces et de celles de l'ennemi ; de bannir de ses entretiens la flatterie, si préjudiciable en pareil cas ; de savoir précisément qui de lui ou du général ennemi a les troupes les plus nombreuses, les mieux armées, les mieux montés, les plus braves, les plus robustes ; et si c'est en infanterie ou en cavalerie qu'il est plus ou moins fort ; car, quoique ce soit dans l'infanterie, comme on sait, que consiste la principale force d'une armée, il doit aussi porter son attention sur la cavalerie, examiner si elle est mieux montée ou plus mal que celle de l'ennemi ; plus ou moins forte en cuirassiers, archers, lanciers ; enfin, à qui des deux partis la position du champ de bataille paraît plus favorable. Si vous êtes supérieur en cavalerie, il faut choisir la plaine ; si au contraire vous êtes plus fort en infanterie, cherchez à combattre dans des lieux serrés, et coupés de fossés, d'arbres, de marais et quelquefois de montagnes.
Mettez-vous au fait du plus ou moins dé vivres sur lesquels l'armée ennemie et la vôtre
peuvent compter ; car la famine est un ennemi intérieur, plus dangereux souvent que le fer : balancez les avantages qui se présentent à traîner la guerre en longueur, ou à la terminer promptement. Tel général qui vous provoque à un combat décisif, ne l'attendra pas, si vous le différez. Soit que les subsistances lui manquent, soit que ses troupes le pressent de les reconduire dans leur pays, soit qu'il s'impatiente lui-même de n'avoir rien à faire de considérable, dans tous ces cas, il sera obligé de se retirer. Et que n'a-t-il pas à craindre dans sa retraite de ses propres soldats fatigués et découragés ? Les uns le trahissent, les autres se jettent dans le parti contraire, une infinité l'abandonnent ; car on est rarement fidèle au parti malheureux :
ainsi l'armée la plus nombreuse se voit bientôt réduite à rien. Il vous est encore important d'étudier le génie du général qu'on vous oppose, de savoir même si ses principaux officiers sont hasardeux, entreprenants ou timides ; s'ils entendent la guerre ou non ; s'ils se conduisent par principes ou au hasard ; de distinguer quelles sont, dans les alliés des ennemis, les bonnes et les mauvaises troupes ; quelles sont les forces, la valeur, la fidélité ; sur lesquelles vous devez compter de la part de vos nationaux et de vos auxiliaires ; en un mot, qui de vous ou de l'ennemi peut se promettre plus raisonnablement la
victoire. Ce sont ces sortes de réflexions qui augmentent ou qui diminuent la confiance.
Mais, quelque découragée que soit votre armée, une harangue vive peut lui rendre sa première audace. Vous dissiperez sa crainte, si vous paraissez, ne rien craindre vous- même, si vous savez engager l'ennemi dans quelque embuscade, l'attaquer par détachement avec vigueur, arrêter ses succès, fondre tout-à-coup sur quelque troupe plus faible ou plus mal armée que les autres ; mais ne menez jamais au combat toute une armée effrayée, ou même inquiète sur l'événement ; soit que vous commandiez de vieux ou de
nouveaux soldats, faites attention s'ils sont tout récemment aguerris par des expéditions
militaires, ou accoutumés depuis quelques années à l'inaction trop ordinaire en temps de
paix.
Le plus ancien soldat peut passer pour nouveau, s'il a discontinué l'usage des combats
: c'est pourquoi, dès que vous aurez retiré vos troupes de leurs quartiers pour les rassembler en corps, faites-les bien exercer, d'abord en particulier, par des tribuns d'une habileté reconnue ; ensuite exercez-les vous-même, comme s'il était question de combattre en bataille rangée ; faites souvent l'essai de leurs forces, de leur intelligence, de leur accord dans les mouvements, de leur docilité dans l'exécution des différents ordres. Ces ordres s'annoncent par la voix, par le son des trompettes, par les différents signaux dont nous avons parlé. Si vos troupes manquent à quelqu'une de ces parties, faites-les exercer jusqu'à
ce qu'elles aient atteint le point de perfection : mais, quelque fermes qu'elles soient sur toutes les évolutions militaires, il y aurait de l'imprudence à les mener à une bataille rangée, sans avoir étudié l'occasion favorable ; tâtez auparavant leur valeur par de petits combats. Un général attentif, prudent, ménager du sang de ses soldats, juge entre eux et les ennemis, comme s'il était question d'une affaire entre particuliers. Si, après avoir pris conseil et fait toutes ses réflexions, il se trouve le plus fort en beaucoup de choses, il attaque avec autant de confiance que d'avantage ; s'il se juge le plus faible, il évite une action générale, se bornant aux ruses et aux petits combats particuliers qu'il sait ménager à propos. C'est ainsi que les grands généraux l'ont souvent emporté sur les médiocres, quoique ceux-ci eussent
l'avantage du nombre et de la valeur des troupes
Legrandalsacien1- Dans l'autre monde
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